samedi 8 novembre 2014

ETAT D’URGENCE "FRANCOPHONE" AU SENEGAL !




Le peuple sénégalais commence à en avoir assez de ces prétendus sommets, qu’ils soient islamique, francophone ou pan-nègre, qui finissent presque toujours par devenir des gouffres financiers, des abîmes sociaux ou des océans de diversion !
Il est certes indéniable que le pouvoir yakaariste a fait preuve de célérité et d’efficacité pour finaliser le Centre International de Conférences de Dakar, dont on veut faire le symbole des ambitions d’un nouveau style de gestion marqué du sceau de l’émergence.
Si on s’amusait à regarder dans le rétroviseur, on se rendrait compte qu’en 2008, l’équipe chargée de l’organisation du sommet de l’OCI avait été beaucoup moins performante. En effet, suite à d’interminables atermoiements, le sommet islamique s’était tenu, après un report de deux ans, avec comme seules réalisations significatives, quelques avenues onéreuses dont la Corniche Ouest avec son tunnel grotesque, des chantiers d’hôtels inachevés et de multiples arnaques que la Justice sénégalaise n’a toujours pas fini de démêler.
Il s’était aussi agi, lors du sommet de l’OCI et du FESMAN, d’une gestion familiale ou clanique visant à faire d’une rencontre internationale une source d’enrichissement familial rapide et/ou une rampe de lancement d’un héritier  politico-biologique.
Malgré tout, certains observateurs n’ont pas manqué de faire le parallèle entre le prochain sommet de la Francophonie et ceux organisés durant l’ère WADE.
C’est ainsi que pour ces trois manifestations censées rehausser le prestige international de notre pays et attirer les investisseurs, on observe plutôt l’étalage de mœurs politiques aux antipodes aussi bien des principes islamiques, des traditions du mouvement d’émancipation des peuples africains que des objectifs et missions que l’O.I.F a dûment consignés dans sa Charte et son Cadre Stratégique. Il s’agit notamment de l’instauration et du développement de la démocratie et du soutien à l’État de droit et aux droits de l’Homme, autant de nobles principes que certains présidents africains francophones – le dernier en date étant Blaise Compaoré – continuent royalement d’ignorer !
Le prochain sommet de la Francophonie, quant à lui, va bien au-delà de la promotion et du rayonnement de la langue française, un ancien instrument de domination culturelle des peuples coloniaux ou de la révision des règles grammaticales de la belle langue de Molière.
Comme par le passé, les autorités sénégalaises ont fini d’instrumentaliser le sommet de l’OIF, qu’elles cherchent à insérer dans un scénario politique visant la réélection de l’actuel chef de l’Etat. Il s’agit du fameux pôle urbain de Diamniadio avec son marché d’intérêt national, sa gare de gros porteurs, ses 200.000 emplois sans oublier les 40.000 logements…etc., autant de desseins ambitieux, auxquels on ne peut souhaiter que le plus grand succès.
Mais encore faudrait-il que les règles de bonne gouvernance ne soient pas sacrifiées sur l’autel du vulgaire pragmatisme politique, comme semblent le suggérer certains spécialistes reconnus de la passation des marchés, en évoquant l’opacité des procédures de gestion ayant présidé à la construction du centre international de conférences de Diamniadio.
Dans le même ordre d’idées, il est inconcevable, qu’au moment où le peuple sénégalais attend la validation et la mise en œuvre des réformes  institutionnelles, les pouvoirs publics semblent vouloir profiter d’un banal sommet de la Francophonie pour opérer des régressions majeures, aussi bien sur le plan de la gouvernance politique que sur celui des libertés démocratiques, en voulant instaurer une sorte “d’état d’urgence francophone ”, avec interdiction de toutes les manifestations politiques sur toute l’étendue du territoire régional, du 10 novembre au 5 décembre prochains.
Sans vouloir se faire l’avocat du PDS ni le dédouaner des fautes de gestion ou des erreurs politiques majeures qu’il a pu commettre, au cours de ses douze années de gestion des affaires publiques, la majorité des citoyens de notre pays estiment que le parti de Me WADE a le droit, comme tous les autres, de dérouler ses activités, nonobstant les contentieux opposant certains de ses dirigeants avec la Justice sénégalaise.
Les traditions de tolérance de notre peuple et l’histoire récente enseignent que la confrontation entre forces politiques doit rester dans les limites de l’Etat de droit pour éviter d’en arriver à des situations aussi dramatiques que celles observées en Lybie, pour ne citer que ce pays assez proche.
Il est de la responsabilité du régime de l’APR, qui est  loin d’opérer les ruptures attendues et fait preuve de beaucoup de maladresses dans le traitement de la traque des biens mal acquis, d’assainir le climat politique en ne versant pas dans un autoritarisme de mauvais aloi. Et tout cela, au nom de la sacro-sainte Francophonie !
NIOXOR TINE

SANTE : L’ACTE 3 DE LA DECENTRALISATION MENACE LA STRATEGIE DES SOINS DE SANTE PRIMAIRES


Les autorités sanitaires ont tenu, au cours des derniers mois, plusieurs réunions en vue d’élaborer la contribution du Ministère de la Santé et de l’Action sociale (MSAS)  à l’acte 3 de la décentralisation. Les propositions des fonctionnaires du ministère de la Santé, si elles sont prises en compte, vont aboutir à l’affaiblissement des systèmes locaux de santé et à l’abandon de la stratégie des soins de santé primaires (SSP).
Malgré l’absence de communication des pouvoirs publics sur l’acte 3, (caractérisé depuis le début par l’opacité dans sa conception et la précipitation dans sa mise en œuvre) et dans l’attente désespérée des arrêtés d’application, il est permis de penser que les mesures envisagées seraient les suivantes :
  • Les postes de santé et centres de santé vont être gérés par leurs communes d’implantation,
  •  Les EPS1 et les EPS2, auparavant gérés par les Conseils régionaux supprimés par l’acte 3, devraient désormais être gérés par les Villes ou les Conseils départementaux, dont les Présidents devraient présider les conseils d’Administration,
  • Il serait envisagé la suppression des districts, qui seraient remplacés par des services départementaux de la Santé et de l’Action sociale, dans le souci de répondre à la nouvelle Collectivité locale qu’est le Département,
  • Ces services départementaux seraient dirigés par des fonctionnaires de la hiérarchie A ou assimilés, qui ne devraient plus être obligatoirement des médecins, dans un souci de « démédicaliser » la Santé,
  • Il a également été suggéré de séparer les fonctions de soins et de gestion, ce qui se traduirait par la suppression du cumul des fonctions de médecin-chef de district (ou chef du service départemental de la Santé et de l’Action sociale) et de médecin-chef du centre de santé de référence,
  • Les comités de santé, organes de participation communautaire, devraient disparaître et devraient être remplacés par des comités de développement de la Santé,
  • Il a été évoqué la possibilité d’ériger les centres de santé en établissements publics de santé de niveau 1 (EPS1)
Ces mesures qui ne semblent présenter aucune cohérence entre elles, ont occulté l’évaluation des lois sur la décentralisation de 1996.
Par ailleurs, le projet d’ériger les centres de santé en établissements publics de santé couplé à la volonté de supprimer les districts sanitaires conduirait à transposer la crise hospitalière au niveau du système de santé local et sonnerait le glas de la stratégie des soins de santé primaires.
L’ERECTION DES CENTRES DE SANTE EN EPS1
Tout le monde se rappelle du décret n°2010-774 du 15 juin 2010,  qui a consacré l’érection des  centres de santé de référence de 10 districts sanitaires en Etablissements Publics de Santé (EPS) de Niveau1 (Guédiawaye, Rufisque, Touba, Tivaouane, Mbour, Linguère, Kaffrine, Richard-Toll , Sédhiou et Dakar-Sud).
Les pouvoirs publics avaient, à l’époque, avancé, entre autres,  le prétexte  de renforcement du parc hospitalier national. Or, le système hospitalier était  et reste plongé dans une crise profonde. Il faut dire que jusqu’au milieu des années 90, le système hospitalier sénégalais battait de l’aile, victime de la pesante tutelle de l’administration centrale avec une détérioration de la qualité des soins à cause de plateaux techniques obsolètes, de ruptures de stock de médicaments, consommables et réactifs, de conditions d’hôtellerie désastreuses…
C’est à cause de lourdeurs administratives et d’entorses dans les procédures de gestion dans les hôpitaux que la Réforme Hospitalière avait été initiée. En effet, ces travers ont conduit à une inefficacité budgétaire, faisant reposer l’essentiel des dépenses de santé sur les ménages, même dans le secteur dit public. Cela conduisit à l’adoption, en 1998, de la loi portant réforme hospitalière et celle relative à la création, à l’organisation et au fonctionnement des établissements publics de santé.
La Réforme hospitalière avait pour ambition de combiner l'exigence du service public avec l'esprit d'entreprise propre au secteur privé.
Or, la première fausse note de cette nouvelle réforme hospitalière a été le recrutement d’un personnel pléthorique, sur la  base de considérations clientélistes, ce qui allait entraîner des effets pervers avec  une insuffisance des personnels qualifiés,  l’augmentation vertigineuse de personnels non qualifiés et l’explosion de la masse salariale. 
C’est ainsi que, malgré cette réforme, la crise du système hospitalier ne connut aucune accalmie mais plutôt une aggravation manifeste, se traduisant par des grèves cycliques.
Les difficultés étaient liées à un endettement sans précédent des hôpitaux du principalement à de ruineuses politiques de gratuité (plan sésame), mais aussi à des dépassements budgétaires de triste mémoire au niveau des EPS.
Malgré tous ces travers qui avaient donné lieu à une grande Concertation Nationale sur le système hospitalier, les autorités du Ministère en charge de la Santé se refusent encore à réformer la Réforme Hospitalière et persistent dans l’erreur, en projetant d’élargir le parc hospitalier national au détriment  des districts sanitaires.
En réalité, certains décideurs semblent trouver leur compte dans le fonctionnement de ces établissements publics de santé accusés de jouir d’une autonomie de gestion excessive, en y plaçant leurs obligés comme directeurs, sous l’œil complaisant de conseils d’administration ressemblant à s’y méprendre à des caisses de résonnance.
NECESSITE D’ADAPTER LE SYSTEME DE DISTRICT
Il faut rappeler, qu’après la conférence d’Alma-Ata de 1978, le concept de district sanitaire sera légitimé à la conférence de l’OMS tenue du 3 au 7 août 1987 à Hararé (Zimbabwé).
La déclaration issue de ces assises insistait sur le renforcement du district de santé basé sur les soins de santé primaires. Cela impliquait entre autres une approche décentralisée de la gestion des ressources et du processus de planification ainsi que la promotion de la participation communautaire et de l’intersectorialité.
Créé principalement pour combattre l’exclusion des larges masses populaires de l’accès aux soins de santé, même les plus banals, le système de district, ambitionnait, dans la droite ligne de la conférence d’Alma-Ata, d’atteindre l’ambitieux objectif de la « Santé pour Tous », en mettant en œuvre les principes d’équité, d’efficacité, d’efficience, d’autonomie et de solidarité. 
La phase ascendante du système de santé de district allait être interrompue au milieu des années 90, quand survinrent les fameuses lois de la décentralisation, qui allaient consacrer le transfert de la compétence Santé aux collectivités locales, lesquelles n’avaient pas, à l’exception notable de la Ville de Dakar, les capacités technico-administratives pour gérer leurs nouvelles prérogatives.
C’est ainsi que les comités de gestion censés permettre la mise en œuvre pratique du transfert de la compétence Santé n’ont pratiquement pas fonctionné depuis l’adoption des lois de la décentralisation de 1996. De plus, on a pu observer de sérieux dysfonctionnements (retard ou absence totale d’exécution) dans la mise à disposition des budgets décentralisés au niveau des structures de santé.
Malgré la contribution remarquable des systèmes de santé de district à l’accessibilité des masses populaires aux soins essentiels, force est de constater que certaines insuffisances ont été notées surtout pour ce qui est de la prise en charge des maladies non transmissibles, des urgences médicales, chirurgicales et gynéco-obstétricales et aussi en rapport avec la qualité des soins.
Cet état de fait est lié aux facteurs suivants :
  • Le déficit de personnels qualifiés particulièrement marqué en zones suburbaine et rurale avec une pléthore d’agents de santé communautaires ;
  • La difficulté pour les médecins-chefs de district de combiner les activités préventives et de santé publique avec celles en rapport avec les tâches quotidiennes de prise en charge de soins hospitaliers de qualité
  • Le manque d’équipements et de matériel biomédicaux
  • Les dysfonctionnements du système d’orientation-recours dus à des structures privilégiant des critères de rentabilité financière sur ceux en rapport à l’accès universel à des soins de qualité,
  • Le désengagement de l’Etat, le plus souvent lié à des plans d’ajustement structurel inspirés par le FMI et la BM
  • La réticence des médecins à exercer dans les zones rurales
  • Les faibles capacités   des collectivités à réaliser leur propre vision.
Concernant les enjeux du financement de la Santé et face à la flambée des coûts auxquels le système de santé doit faire face, l’OMS préconise la mise en place d’une Couverture Sanitaire Universelle, qui dans nos pays comporte une forte composante mutualiste et communautaire.
Si on admet que la couverture sanitaire universelle doit être couplée à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion et qu’il y a nécessité d’agir sur les déterminants sociaux (eau potable, assainissement, disponibilité alimentaire, habitat décent…), il devient évident qu’affaiblir les districts sanitaires, clés de voûte de l’approche multisectorielle en santé, revient à compromettre la réussite de la couverture sanitaire universelle.
QUELLES PERSPECTIVES POUR LE DISTRICT SANITAIRE ?
Malgré ces insuffisances, il convient de rappeler que la conférence d’Ouagadougou en 2008 a confirmé que la stratégie du district sanitaire demeurait plus pertinente que jamais. Il faudrait cependant l’adapter au nouveau contexte marqué par la couverture sanitaire universelle. La nécessité d’œuvrer pour la santé communautaire a été réaffirmée, particulièrement  dans les milieux dépourvus en ressources confrontés aux problèmes d’équité et d’accessibilité aux soins les plus aigus.
Il faudra, plus que jamais, veiller au renforcement des systèmes locaux de santé, à l’autonomisation des communautés, ménages et individus qui, de concert avec les professionnels de la santé, jouent un rôle dans la production de la santé.
Seule la stratégie de district permet de responsabiliser les communautés dans la gestion de leur santé, qu’il s’agisse de combattre les maladies transmissibles aiguës ou chroniques ou de prévenir la survenue d’affections non transmissibles et maladies à soins coûteux.
Il ne faut cependant pas perdre de vue la possibilité qu’ont les usagers, surtout en milieu urbain, de choisir les services qui leur conviennent, en faisant abstraction des limites administratives. Cette nouvelle donne interpelle particulièrement les prestataires appelés à faire preuve de davantage de réactivité, d’autant que l’offre de services est de plus en plus diversifiée (structures publiques, privées, informelles, non-gouvernementales, confessionnelles, paramilitaires, d’entreprises…etc.).
Il y a nécessité d’adapter district sanitaire en  milieu urbain, en raison de la diversité de l’offre de services. Cela va nécessiter l’harmonisation des interventions des différents acteurs appelés à s’approprier des objectifs du PNDS.
C’est cela qui justifie l’adoption par les districts sanitaires de diverses stratégies plus ou moins nouvelles (stewardship, supervision, signature de convention, financement basé sur les résultats…).
La coordination entre les différents acteurs (SDSAS, collectivités locales, communauté) va être rendue plus difficile par l’éclatement des pouvoirs de décision : service départemental de la santé et de l’action sociale, préfecture, département en tant que collectivité locale, établissements publics de santé en lieu et place des centres de santé, postes de santé…
La suppression envisagée des comités de santé va compromettre l’autonomisation des communautés, ménages et individus, d’autant que la représentation des usagers, telle qu’elle se fait actuellement est loin de répondre à des normes et principes démocratiques. Il s’agit, le plus souvent, d’une cooptation discrétionnaire de membres d’organisations sans véritable assise locale.
Il serait, à cet égard, intéressant, d’explorer la voie de l’hôpital de district, considéré comme un établissement faisant partie d’un système complet de soins, le district sanitaire. Son rôle résulte de la répartition des tâches au sein du district et il sert de structure de référence aux postes de santé, aux centres de santé secondaires, aux structures privées confessionnelles…etc.
Il peut, dans le cadre  du renforcement des soins de santé primaires et de la promotion de la santé communautaire,  servir de moteur au district sanitaire animé par une équipe-cadre, des infirmiers chefs de postes, assistés de comités de santé et d’organisations communautaires de base.
Des structures telles que les centres de santé de référence des districts de Dakar (Philippe Maguilen Senghor, Nabil Choucair, Gaspard Kamara, Youssou Mbargane Diop) offrant une gamme de services médicaux, gynéco-obstétricaux et de petite chirurgie, à côté de leur rôle de mise en œuvre et de supervision des SSP remplissent toutes les conditions pour devenir non pas des EPS mais des hôpitaux de district.
Dans ces hôpitaux de district dirigés par des cadres médicaux, il pourrait exister un agent comptable particulier et un Conseil d’Administration, présidé par le Chef de la Collectivité locale concernée, dans lequel les acteurs locaux (dont les comités de santé qui devraient se désengager de la gestion financière) seraient mieux représentés aux dépens de personnalités qualifiées cooptés sur des bases obscures et de bureaucrates partisans de la routine administrative.
Les pouvoirs publics devraient revoir les modalités du transfert de la compétence Santé à des Collectivités Locales piégées par la politique politicienne et l’électoralisme primaire et qui doivent encore faire l’apprentissage d’un véritable développement local.

Dr Mohamed Lamine LY
Médina-Rasmission

  1. Déclaration de Ouagadougou sur les soins de santé primaires et les systèmes de santé en Afrique : Améliorer la santé en Afrique au cours du nouveau Millénaire ; La Conférence internationale sur les Soins de Santé primaires et les Systèmes de Santé en Afrique
  2. Renouveler la stratégie du district sanitaire pour faire avancer la Couverture Sanitaire Universelle en Afrique; Conférence de Dakar - Health for Africa

mercredi 17 septembre 2014

EBOLA : UNE MAUVAISE GESTION DE L’EPIDEMIE POURRAIT COMPROMETTRE LA TENUE DU SOMMET DE LA FRANCOPHONIE




Au moment où les autorités gouvernementales sénégalaises sont en train de finaliser, à mi-mandat, le centre de conférences de Diamniadio  d’un coût de plusieurs dizaines de milliards, les agents de santé, agents d’hygiène et sapeurs-pompiers, restent très dépourvus pour la gestion des cas suspects d’Ebola, ce qui pourrait favoriser l’extension rapide d’éventuels cas confirmés. Que fait donc la Commission chargée de la logistique au sein du Comité national de gestion des épidémies ?
Dans la lutte contre la fièvre hémorragique due au virus Ebola, les autorités ministérielles sénégalaises ont certes engrangé quelques acquis, particulièrement dans les volets Communication et Collecte de fonds, ce qui leur a d’ailleurs valu les chaleureuses félicitations d’officiels américains et français !
Cela ne peut nous empêcher de  nous interroger sur la pertinence de la mise en exergue de la guérison de notre seul cas confirmé mais importé, alors qu’il s’agit plutôt d’empêcher l’apparition de nouveaux cas et leur extension, ce que seules des stratégies communautaires peuvent permettre de réaliser. C’est pourquoi, les autorités sanitaires locales ne comprennent pas le fait que leurs plans communautaires de lutte contre la maladie due au virus d’Ebola, élaborés depuis le mois d’Avril ne soient pas toujours financés.
Selon les sources officielles, désireuses d’éviter la mise en quarantaine de notre pays, pour des raisons d’ordre religieux (pèlerinage à la Mecque) ou économiques (fuite des touristes ou investisseurs), le Sénégal serait donc exempt du virus de la fièvre hémorragique Ebola. N’eut été ce jeune guinéen orphelin et déboussolé, que certains de nos compatriotes atterrés qualifient de « dément » ou de « démoniaque », à l’origine de notre seul cas importé, le nom de notre pays n’aurait jamais dû être associé – selon eux – à cette épidémie « avilissante » n’atteignant que des pays tout juste sortis de guerres meurtrières et fratricides ou d’autres disposant certes de ressources abondantes, mais victimes d’une mal-gouvernance patente, car ayant eu la malchance d’être dirigés, depuis leur entrée majestueuse et remarquable dans le concert des nations indépendantes, par des dirigeants paranoïaques, burlesques ou tout simplement incompétents et cupides !
Mais force est de constater, avec regret, que l’épidémie d’Ebola pourrait tout de même atteindre notre contrée bénie, où reposent tant de saintes créatures ! Il est, en tout cas clair que ce n’est pas la simple fermeture de frontières artificielles, dont la perméabilité est établie, qui nous préservera d’une contagion quasi-inéluctable. Cela n’est pas forcément de la faute des pouvoirs publics, mais notre sort peu enviable est lié à des contraintes en rapport avec notre géographie, notre histoire et des paramètres socio-anthropologiques.
Tant et si bien que le virus Ebola pourrait apparaître en n’importe quel point du territoire national, ce qui rend d’autant plus impératif le renforcement de la surveillance épidémiologique. Aucun cas ne doit échapper au système national de santé, qui devra circonscrire tout nouveau foyer qui pourrait apparaître !
Mais cela suppose que les agents de première ligne comme les personnels en charge des consultations primaires curatives diurnes et nocturnes, de la prise en charge des urgences médicales, chirurgicales et gynéco-obstétricales, du suivi des contacts, de la gestion des cadavres et de la désinfection des locaux (agents de santé, sapeurs-pompiers, agents d’hygiène…) soient mis dans des conditions de sécurité adéquates.
C’est le lieu de réclamer pour tous ces travailleurs de la Santé et de l’Action Sociale,  découragés par une bureaucratie syndicale apathique et ces hommes de tenue n’ayant pas le droit de grève, des mesures de protection adéquates,  car il est inconcevable d’aller à la guerre sans armes, même si on accepte le principe de ne pas lui survivre !
Une note de rappel à l’intention des médecins-chefs et directeurs d’hôpitaux sur la nécessité pour les agents de prendre des mesures de protection contre l’agent causal de la fièvre hémorragique à Ebola est certes un pas dans la bonne direction. Mais compte-tenu du marasme économique ambiant régnant dans les structures de santé saignées à blanc par des politiques de gratuité hasardeuses, la non-exécution des fonds de dotation décentralisés aggravée par le fameux acte 3, les coupes sombres opérées sur les budgets du ministère de la santé et de l’action sociale  et la spirale indemnitaire entrée dans les mœurs hospitalières, il semble qu’il faille se décider, pour éviter la survenue de drames inutiles, à approvisionner, à partir des ressources nationales centrales (y compris les plus occultes), toutes les structures sanitaires, sans oublier le casernes de sapeurs-pompiers et les brigades d’hygiène en matériel de détection des cas suspects (thermo-flash) et de protection (gants, masques, antiseptiques, solutions hydro-alcooliques, équipements de protection individuels…)
Seul un maillage correct du territoire national par des agents aguerris et rassurés parce que protégés par des équipements suffisants et de qualité permettra de circonscrire les éventuels cas qui pourraient survenir et éviter leur propagation dans les quartiers surpeuplés de la grande et populeuse agglomération dakaroise, caractérisés par une promiscuité effroyable. Il faudra également que l’Etat assure – en cas de besoin- la subsistance des cas suspects confinés dans leurs domiciles pendant trois semaines.
Car notre pays n’a que faire d’une épidémie d’Ebola !
Nous avons - pour ceux qui ne s’en seraient pas aperçus – une conférence francophone à organiser ! Pour cela, nous avons construit, en quelques mois, un centre de conférence moderne pour accueillir le XVe Sommet de la Francophonie prévu les 28 et 29 novembre 2014 à Dakar. Et cela, malgré les délestages électriques, les coupures d’eau, les retards de paiement de bourses ou de salaires d’enseignants titulaires ou vacataires !
Ce sommet, qui rappelle celui de l’Organisation de la Conférence Islamique, serait-il destiné à tenir en haleine le peuple sénégalais en direction des prochaines élections présidentielles ? Voudrait-on nous faire miroiter le mirage d’une nouvelle politique d’aménagement du territoire permettant l’accès à des infrastructures modernes pour décongestionner la capitale dakaroise ?
La meilleure stratégie électorale, pour convaincre le peuple sénégalais très éprouvé ces derniers temps, devrait consister à satisfaire la demande sociale pressante, à commencer par la maîtrise et le contrôle de la fièvre hémorragique due au virus d’Ebola.
NIOXOR TINE